Une escapade inattendue à Samara

 

Le 23 octobre 2017

Après quelques jours passés à Kiev, nous avons prévu que notre prochaine étape serait Astana, capitale du Kazakhstan. A l’issue de trois jours de stop, nous sommes arrivés avec quelques difficultés à Penza, en Russie.

 

Nous avons ensuite été pris dans le camion d’Andrei pour aller de Penza à Samara, soit pour environ 400 kilomètres : nous étions contents. Ne parlant pas de langue en commun, la communication était plutôt difficile, et ce malgré l’aide de notre application de traduction sur le smartphone. Nous avons cependant réussi à comprendre qu’il devait faire une pause de trois heures après avoir roulé de nombreuses heures d’affilée. Nous étions à 180 kilomètres de notre destination. La nuit étant déjà tombée et comme rien ne nous pressait, nous avons décidé de rester avec lui. Ayant repéré un hôtel un peu avant Samara (bien entendu sur sa route), nous comptions demander à notre chauffeur de nous y déposer une fois la pause terminée. Il s’agissait plutôt de tenter de lui faire comprendre l’idée globale à l’aide de phrases courtes traduites en russe, voire de simples mots accompagnés de mimes, tout en pointant des lieux sur la carte !

 

Une fois cette décision prise, Vincent est descendu du camion pour aller aux toilettes à la petite station-service plus en amont, pendant que Mélanie gardait les sacs dans le camion (on ne sait jamais…). De retour au camion, Vincent n’en est pas revenu : « Tu ne devineras jamais ce qu’il vient de m’arriver ! » Alors qu’il patientait pour aller aux toilettes, un homme, l’ayant entendu s’exprimer en anglais, a engagé la conversation. Après avoir échangé quelques phrases expliquant notre présence ici, il lui a tendu la main : « Victor ». Son fils a ensuite abordé Vincent, lui donnant un papier où étaient inscrits une adresse mail et un numéro de téléphone. La conversation s’est poursuivie dehors et Victor lui a dit de l’appeler une fois arrivés à Samara. Quelque peu surpris, Vincent ne comprenait pas vraiment le but de leur démarche. Quand son fils a mentionné le couchsurfing, Vincent a fini par comprendre qu’il proposait de nous héberger. L’idée l’a immédiatement séduit mais il a indiqué que nous allions arriver tard à Samara (après minuit). Ils devaient partir mais ont fait signe à Vincent de les appeler quand même.

 

De retour au camion, consciente de l’opportunité qui se présentait, Mélanie a tout de suite adhéré à l’idée. Rien ne pressait, et c’est aussi pour ça que nous avions choisi le stop : l’imprévu des rencontres. Il fallait maintenant traduire cela à Andrei afin de savoir si un point de rencontre était possible. Et cela a rapidement été chose faite : nous avons compris qu’ils avaient convenu de se rappeler pour se retrouver à Samara. Nous sommes arrivés en ville seulement à 2h40 du matin ! Nous étions partagés entre excitation et gêne d’arriver aussi tard et de se laisser « prendre en charge ». Victor guidait Andrei au fur et à mesure vers le centre de Samara, déserté à cette heure très tardive. Et jouer au taxi ainsi n’avait même pas l’air de déranger notre camionneur russe !

 

Une fois en voiture avec Victor, il nous a bombardés de questions sur le chemin pour… on ne savait où ! Il fallait nous voir, chacun avec son smartphone à la main, tapant frénétiquement tour à tour questions et réponses dans l’application de traduction. Même si certains peuvent critiquer cette façon de communiquer propre au XXIe siècle, cela nous a beaucoup amusés, surtout dans le contexte où nous étions : dans la voiture d’un étranger, en Russie, en pleine nuit !

 

 

Nous avons compris que ce soir (ou plutôt ce matin - sans vouloir relancer le débat) nous allions dormir à l’hôtel et qu’il reviendrait nous voir en fin de matinée. Il nous a écrit que nous étions invités à diner chez lui et sa femme Olga. Même pas le temps de réfléchir, il avait déjà payé la note pour la nuit et était reparti. Nous avons fermé la porte de notre chambre, n’en revenant toujours pas d’être là. Il était 3h30 du matin !

 

Le lendemain, une fois avec Victor, nous avons peiné à comprendre le programme de la journée. Nous avons été déçus quand il nous a annoncé que ses plans avaient changé et qu’il ne pouvait rester que quelques heures avec nous. Il n’était plus question de diner avec sa famille. Bien décidés à profiter de ce temps imparti, nous sommes allés nous promener tous les trois sur le remblai de la Volga, un café brûlant à la main. Là encore, les questions ont fusé sur nos smartphones. Il nous a en même temps présenté Samara où il réside depuis un peu plus d’une dizaine d’années. Après avoir convenu que nous dormirions une nuit de plus au même hôtel, il nous a proposé d’aller déjeuner puis de visiter le musée du cosmos de Samara. Nous nous sommes laissés porter et avons accepté. Nous avons repris la voiture et Victor nous a fait une visite de la ville. Les heures passaient et nous nous demandions comment nous allions pouvoir tenir le programme annoncé puisqu’il était déjà plus de 15h30 et qu’il nous avait dit devoir partir à 16h30. Nous en avons déduit qu’il avait une nouvelle fois modifié son programme, ce dont nous étions contents. Son métier d'agent immobilier devait lui laisser un peu de souplesse quant à la gestion de son emploi du temps. Finalement, il nous a écrit que nous allions déjeuner chez lui. Super !

Nous avons ainsi été accueillis dans son appartement par sa belle-mère, sa femme Olga, leurs deux enfants Nicki de 15 ans et le petit Maxim de 9 mois, sans oublier leur chat Lucien ! Pendant que nous discutions en anglais avec Nicki, Victor et Olga nous ont préparé à manger : cognac fait maison, tomates en bocaux de la belle-maman (légèrement sucrées, délicieuses), mouton, vin géorgien… La conversation s’est poursuivie ensemble à table. Nous nous sentions comme à un repas de famille un dimanche en France. Nous leur avons demandé pourquoi ils nous avaient invités puis accueillis de la sorte. Ils nous ont répondu que c’était intéressant de se rencontrer et d’échanger. Cet intérêt était tout à fait partagé ! Nous avons abordé tous les sujets qui nous passaient par la tête et quand nous avons été repus d’informations et de nourriture, Victor nous a proposé de nous ramener à l’hôtel. Nous avons fait un arrêt à une sorte de boulangerie pour que nous puissions acheter ce qu’il fallait pour le lendemain matin. Nous étions un peu perdus et tristes de devoir se séparer. 

Pourtant ce n’était pas fini ! Enfin, pas tout de suite puisque sur le chemin du retour, Victor nous a demandé si nous voulions aller voir la fusée de Samara. La nuit était tombée et il neigeait ! En chemin, il nous a proposé de faire un arrêt à une ancienne fabrique de bière. Encore un changement de programme, il fallait le suivre, Victor ! Il nous a offert de la bière artisanale, remplie devant nous dans une bouteille en plastique basique avec un tuyau ! Maintenant que nous avions la bière, il fallait acheter le poisson séché à l’étal juste à côté qui, selon la tradition russe, se dégustait avec. Après avoir goûté cet étonnant mélange (c’était fort !), nous avons filé voir la fusée de Samara. Il nous a expliqué que la ville était un centre industriel important, notamment pour la production de fusées et de véhicules spatiaux. 

Cette fois ça y était, il était temps de rentrer. Mais non ! Il nous a encore proposé de s’arrêter à une cave pour acheter le vin géorgien que nous avions dégusté au déjeuner. Nous avons décliné son offre : nous ne pouvions pas nous charger de bouteilles de vin, même s’il était délicieux, nous qui avions fait en sorte d’avoir un sac à dos le plus léger possible. Toute la journée, nous nous étions répété que quand nous quitterions Victor, nous profiterions d’être en ville pour acheter des gants et des bonnets, car il faisait de plus en plus froid à mesure que nous cheminions vers l’est. Les heures défilant, nous avions plus ou moins abandonné l’idée et nous ne voulions pas impliquer notre hôte déjà tellement attentionné. Avec la proposition pour la cave, nous nous sommes finalement dit qu’un arrêt de plus ne le dérangerait peut-être pas. Plus que ça, nous en avons profité pour essayer la fameuse chapka russe ! Il nous a même négocié les prix sans qu’on ne lui ait rien demandé ! Et une fois retournés dans la voiture : "Avez-vous d'autres choses à acheter ?".

Cette fois, il était temps de retourner à l’hôtel. Après que Victor nous ait donné des conseils sur les précautions à prendre pour notre sécurité en voyage, nous nous sommes dit au revoir. Nous étions tous les trois émus. Nous sommes retournés dans notre chambre d’hôtel, vraiment chamboulés. Il était 20h30, on ne le connaissait que depuis 24h !

 

 

 

Cette journée restera très longtemps dans nos mémoires et nous remercions encore une fois Victor et sa famille pour leur hospitalité et toutes les attentions à notre égard pendant ce bref séjour à Samara. большое спасибо !

 

Au passage, nous nous demandons si en France, nous en aurions fait autant. De quoi s'interroger sur l'hospitalité française... 

 

 

 

 

 

Et la route a repris vers l’est russe avec la traversée de l'Oural, puis le Kazakhstan...